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Le territoire
Il est toujours possible de concevoir un groupement de commande dont les objectifs prioritaires sont le prix et les conditions d’approvisionnement. Ce n’est plus la tendance générale. Les groupements sont maintenant entendus comme des
éléments structurants des territoires sur lesquels ils sont déployés. C’est ainsi que des collectivités initient et coordonnent leurs propres groupements. Et lorsqu’elles ne les coordonnent pas, elles restent vigilantes sur les conditions de leur mise en œuvre et les conséquences sur le tissu économique local.
Pour cela, l’équipe qui souhaite mettre en œuvre un groupement de commandes alimentaires doit prendre en compte le territoire sur lequel il va se déployer. Les rédacteurs des cahiers des clauses sont souvent des collègues chevronnés en matière de droit de la concurrence ou administratif, mais ici il s’agit de comprendre de manière physique quelles sont les principales composantes du secteur économique concerné.
Pour cela, ils doivent s’ouvrir à leur environnement.
Il faut s’intéresser à la géographie : lors des échanges entre coordonnateurs, nous constatons que celle-ci est fondamentale pour comprendre le potentiel agricole local et l’aider à se mettre en valeur lors des mises en concurrence. Pour cela, la connaissance de la part de plaines, de massifs montagneux ou massifs forestiers est importante. Chaque zone doit être appréciée : ici la mono culture domine (ex. terres à blé, productions industrielles de légumes, vignes…), là la polyculture, et la pluralité des exploitations comportant des productions couvrant sur certaines familles de produits le champ complet des besoins du groupement.
Dans le même ordre d’idée, l’importance des zones urbaines sur le territoire concerné peut influer sur la production potentielle. En effet, les grandes agglomérations exercent une pression sur la demande en raison des volumes nécessaires et peuvent éliminer les petites unités agricoles. Mais il est fréquent de constater dans sa périphérie de ces territoires urbains, des zones de production intéressantes et à valoriser, le maraîchage par exemple, dont la compatibilité avec les zones urbaines n’est plus à démontrer.
La connaissance des productions proches est essentielle. Trop souvent, l’acheteur vit sur ses certitudes. Tous les territoires disposent d’unités de productions soucieuses de jouer un rôle dans l’approvisionnement en circuit court. Le responsable du groupement doit estimer du mieux possible lors de la première rédaction du cahier des clauses quelles sont les potentialités en maraîchage, en productions fruitières permanentes ou saisonnières, en exploitations animales ou de transformations de matières premières (abattoirs, charcuterie ou produits laitiers…).
Cette connaissance passe également par celle des producteurs locaux, de leurs envies, de leurs aptitudes à fournir et répondre à des acheteurs publics. Il est important de comprendre les liens économiques et contractuels qui peuvent lier des producteurs avec des coopératives, dans certains cas, ces liens obligent à une exclusivité de livraison de la production.
Les acteurs
Lorsqu’on souhaite initier un groupement de commandes, bien souvent on s’attend à se confronter à des problèmes de rédaction juridique ou de maîtrise des procédures, et l’on cherche à limiter le risque juridictionnel au maximum. On constate parfois avec surprise qu’une phase de communication préalable à toute mise en œuvre s’avère nécessaire. En effet, nous intervenons dans le champ de compétence de nombreuses collectivités ou organismes semi-publics avec lesquels il vaut mieux être perçu comme un partenaire.
Toutes ces structures publiques ou assimilées interviennent sur le champ économique concerné et souhaitent réellement œuvrer à la relocalisation des approvisionnements. Bon nombre d’entre elles ont pris conscience que la commande publique initiée par les EPLE était un vecteur non négligeable dans ce domaine. Au-delà de cette réalité économique, l’image que nous donnons auprès des familles fréquentant nos restaurants scolaires est essentielle pour les responsables politiques.
• Les collectivités de rattachement : la région pour les lycées, lycées agricoles et maritimes et le département pour les collèges. Elles sont les premières à consulter et à associer. Il faut accepter de les intégrer aux principales étapes de mise en place du groupement. Il est essentiel en outre de leur faire comprendre que les résultats attendus ne peuvent être immédiats et qu’il s’agit là d’un travail de moyen, voire de long terme.
• Les autres collectivités : il s’agit principalement des communes et des intercommunalités qui ont la compétence sur le premier degré. Nos élèves dans le secondaire sont parfois issus d’écoles qui pratiquent une commande publique efficiente, accompagnée d’un discours porteur. Les agglomérations et métropoles, souvent par le biais de cuisines centrales sont aussi des éléments à ne pas négliger surtout si elles souhaitent adhérer à ce groupement ou si elles ont une bonne connaissance des potentiels locaux. Il faut alors entendre leurs souhaits qui sont généralement ceux des citoyens.
Il ne faut pas négliger dans la comparaison des pratiques déjà mises en place le fait qu’un groupement d’EPLE démultiplie les points de livraison et donc les contraintes, ce qui n’est pas le cas des communes ou agglomération surtout si elles disposent d’une cuisine centrale.
• Les chambres consulaires : qu’il s’agisse des professions agricoles ou des métiers de l’artisanat, une bonne relation avec ces structures permet d’appréhender rapidement le potentiel local en ressources agricoles ou de transformation de proximité (charcutier, production laitière, produits de 4ème ou 5ème gammes…).
Les producteurs ou éleveurs : c’est le domaine le plus délicat. Tant que le groupement n’est pas actif, il est difficile de se faire connaître et reconnaître comme un partenaire économique viable. En effet, la taille du groupement et les masses financières seront étudiées par les acteurs locaux. Pour aller à la rencontre des producteurs et des éleveurs, il faut savoir
comment ils sont organisés. En effet, les territoires n’ont pas les mêmes us et coutumes. La géographie et l’histoire locale peuvent influer sur leur capacité à s’unir et à initier des groupements ou coopératives. La mise en partage des expériences entre différents coordonnateurs est alors essentielle pour comprendre les enjeux locaux.
• Les grossistes et/ou transporteurs ou la question de la logistique : produire est un métier, réceptionner, transporter et livrer en est un autre. Acteurs incontournables, ces opérateurs économiques ont également toute leur place dans le paysage de la restauration collective. Les rencontrer et échanger sur leur modèle économique, les objectifs poursuivis par le groupement etc. permettent d’éclairer les choix qui seront faits par la suite en matière de construction des marchés. Les relations commerciales qu’ils sont en capacité ou pas de construire avec les producteurs locaux sont autant d’informations précieuses qu’il faut aller chercher.
• Les nutritionnistes ou diététiciens : la définition des produits en terme de grammage ou d’apports caloriques nécessite une approche professionnelle extérieure. Une bonne définition et précise des produits est essentielle pour la crédibilité du groupement et du coordonnateur aux yeux des opérateurs économiques.
• Les agences, fédérations et interprofessions : il existe un certain nombre d’organismes dont la mission est d’aider à la structuration des filières, de faciliter les connaissances réciproques entre producteurs et acheteurs.
• Les administrations d’état : à ce titre, il faut inclure les rectorats, les directions académiques des services de l’éducation nationale et la DRAAF pour les lycées agricoles. Fonctionnaire d’état, nous devons informer notre hiérarchie de nos missions ou actions qui peuvent parfois entrainer des échanges officiels avec les diverses collectivités territoriales.
• Les opérateurs de terrain : aucun groupement ne peut fonctionner sans les cuisiniers et leur équipe, les magasiniers et les adjoints-gestionnaires ou responsables économiques en charge de la charge de la structure de production. Ce sont eux qui donneront la crédibilité définitive au groupement ne respectant quotidiennement les objectifs collectifs.
D’autres services de l’état peuvent être des partenaires essentiels. A ce titre il faut faire une place particulière à la direction régionale de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (DRAAF).